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12 novembre 2015 4 12 /11 /novembre /2015 18:56
Crète un jour, retour sur une trace de lumière

La plus grande des iles grecques n’est pas forcément la plus belle d’entre elles, mais elle bien leur reine.

En regardant l’Afrique, elle tire dans son sillage courroucé toutes les iles du feu roi Egée, les Cyclades et les Dodécanèse ramassées.

Elle assoit son autorité naturelle sur la variété de ses paysages, de ses villages, de ses mers d’oliviers, de ses montagnes tantôt pointant vers les nuages passagers, tantôt plongeant dans l’eau frémissante et remplie de leur ombre que pourfend le soleil.

Ces routes et chemins suspendus par-dessus des panoramas verts ou d’arides canions, finissent par descendre à pic vers la mer, là où l’angle entre l’eau et la terre bascule, créant l’illusion de deux plans inclinés, l’un fait d’eau et l’autre de terre, qui s’entrecoupent sur la ligne de leur partage.

Les chèvres sauvages sont à peu près partout.

Sa majesté, sauvage. Rien en Crète n’est véritablement arrondi, sa douceur coule de son mélange d’ombre et des lumières, des rangées d’oliviers qui jalonnent inlassablement tous ses chemins.

Elle coule aussi de ses lieux, comme Matala, Agia Galini ou Preveli, qui ne se laissent pas apprivoisés par le regard pesant des touristes.

La baie d’Agios Nikolaos ne se laisse pas regardé d’un seul coup, il vous fait tourner la tête.

Dans le petit golf de Matala on ne vit jamais demain, mais le même jour, éternellement.

Les hippies y ont laissé un écriteau : « today is life, tomorrow never comes ».

Entre les deux parois de crête percluses de mini grottes le temps se fige, on lui refuse sa marche organisé en avant !

En chevauchant en voiture les versants près de la mer, on a souvent l’impression que c’est le plan d’eau vergeturé d’écumes qui monte et qui descend, et non pas la route qui guide notre avancement.

La falaise verticale en haut de laquelle s’agglutinent presque toutes les maisons d’Aghia Galina, sans filet, est faite que de terre. Elle défie le sens commun et celui de l’ingénieur de génie civil et se laisse admirée pour son audace. Elle ne s’écroulera pas, car elle ne s’est jamais écroulée. Elle est la marque de fabrique de cette ile particulière, imbue de son immuable sérénité.

Mirto s’appelle le village où les vergers d’orangers on fait pousser des maisons entre eux et la mer, une mer chaude de toute la lumière qu’elle distille, plate de tous les levés de soleil qui y assoit son sentier vers la terre, tous les matins.

Les orangers sont toujours là, mais aussi quelques barques de pêcheurs.

Les touristes y sont peu nombreux, car là-bas les hébergements sont plutôt rares, ici et là dans des maisons formant une trame régulière dans ce village tantôt en pente douce, tantôt en faux plat.

En front de mer les bâtisses gagnent un tantinet soit peu en hauteur. Puis une coursive pavée en granit taillé indifféremment, à l’ancienne, sépare leurs façades d’un collier étendu de tavernes peu profondes qui s’arrête là où la mer commence.

Peu éclairées, au fur et à mesure que les derniers reflets de la lumière du jour s’estompent dans les eaux calmes du soir, ces tavernes accueillent chacune une poignée de touristes qui ont eu la chance d’être rattrapés par nuit quand ils passaient près de ce village enchanté. J’en faisais partie. Enfin, presque, car j’avais découvert ce lieu bon nombre d’années auparavant. Et tout m’est revenu, très vite…

La colline dessinant une selle à cheval ferme ce cadre qui, depuis la coursive, constitue une réalité subtile, qui se regarde dans un angle étroit.

Cette colline me paraissait, quand j’y suis venu la première fois, une haute montagne. Maintenant je sais qu’elle est bien plus petite et que donc, l’univers continuait derrière elle.

Pour un instant, je l’ai vue aussi grande et imposante que ce soir-là, quand après plusieurs verres de raki, la jeune femme à mes côtes a levé le défi qui lui avait lancé Iannis Le Gallois, notre compagnon de la soirée.

Ils ont fait la course jusqu’au bout de la coursive et retour.

Les cheveux blancs d’Iannis avaient laissé une trace lumineuse dans l’air chaud de la nuit.

Oui, cette course s’est déroulée comme un éclair. Comme tout le reste, et mes souvenirs avec.

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